Les grands-parents peuvent-ils maintenir des relations avec leurs petits enfants en cas de conflit avec les parents

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LES GRANDS-PARENTS PEUVENT-ILS MAINTENIR DES RELATIONS AVEC LEURS PETITS-ENFANTS EN CAS DE CONFLIT AVEC LES PARENT ?

Les grands-parents ont souvent un rôle évident dans l’évolution psychoaffective d’un enfant. Les grands-parents peuvent ainsi avoir une importance particulière dans la dynamique familiale : source de soutien, porteurs de messages, de sagesse et de bienveillance ; et sont parfois disponibles pour épauler les parents.

Dans la plupart des famille, cela va de soi. Mais dans certaines situations, les relations petits-enfants/grands-parents ne se font pas naturellement. Comment faire alors lorsque des grands-parents n’ont plus de relations avec leurs petits-enfants.

Par Maître Natacha JULLIEN-PALLETIER, Avocat, spécialisé en Droit de la Famille

L’autorité parentale sur un enfant appartient en principe aux parents, qui sont donc autorisés à contrôler, comme ils l’entendent, les relations de leur enfant avec les tiers, et notamment les grands-parents. Dans certains cas, les parents ne souhaitent pas que leur enfant entretienne des relations avec leurs grands-parents.

Or, sous l’inspiration de la convention internationale des droits de l’enfant, le Code Civil précise que les relations entre les ascendants et leurs petits-enfants sont considérées comme un droit de l’enfant. Ainsi, l’article 371-4 alinéa 1er du Code Civil prévoit que « L’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à l’exercice de ce droit. ».

1°/ LE DROIT DE L’ENFANT AUX RELATIONS PERSONNELLES AVEC SES ASCENDANTS

Le Code Civil consacre donc le principe que l’enfant a le droit d’entretenir des relations personnelles avec ses grands-parents. Il est donc présumé qu’il est de l’intérêt d’un enfant d’entretenir des relations avec ses ascendants.

Ainsi, lorsque des grands-parents sont empêchés de voir leurs petits-enfants, ils peuvent saisir le Juge aux Affaires Familiales afin de solliciter la fixation d’un droit de visite ou d’hébergement. Ils agissent alors contre les parents de l’enfant en leur qualité de titulaires de l’exercice de l’autorité parentale. Le Juge aux Affaires Familiales saisi devra alors fixer des droits de visite et d’hébergement au profit des grands-parents, qui s’imposeront alors aux parents. Il appartient au Tribunal d’apprécier quel est le meilleur aménagement concret de ces relations personnelles. Il s’agit le plus souvent d’un week-end par mois et d’une partie des vacances scolaires.

Toutefois, si la situation apparaît très conflictuelle entre les grands-parents et les parents, le Juge peut prévoir des relations réduites qui peuvent être limitées à quelques heures, où organisées notamment dans un lieu protégé. Les grands-parents rencontrent alors leurs petitsenfants à l’intérieur d’un lieu aménagé pour ces visites et en présence de professionnels qualifiés. De même, si les relations entre les grands-parents et les petits-enfants ont été longtemps, ou violemment interrompues, le Juge aux Affaires Familiales n’accordera alors qu’un droit de visite limité afin de permettre une reprise progressive des contacts.

Lorsque les parents sont eux-mêmes séparés, pour éviter de multiplier les droits de visite pour l’enfant, le Juge peut aussi décider que le droit de visite des grands-parents s’exercera en même temps que le droit de visite et d’hébergement de leur propre enfant ; c’est-à-dire du père ou de la mère de l’enfant.

En tout état de cause, les mesures prises par le Juge au profit des grands-parents seront adaptées à la vie familiale de l’enfant et n’empièteront pas de manière excessive sur le droit de chacun des parents qui restent prioritaires.

Le droit de saisir le Juge aux Affaires Familiales, afin de règlementer des droits de visite et d’hébergement sur des petits-enfants, appartient à l’ensemble des ascendants et donc concerne également des arrières grands-parents.

2°/ DANS CERTAINS CAS, LA DEMANDE D’UN DROIT DE VISITE ET D’HEBERGEMEN D’UN GRAND-PARENT PEUT-ETRE REJETEE :

La Loi prévoit que l’intérêt d’un enfant présume qu’il puisse entretenir des relations régulières avec ses grands-parents. Cependant, parfois, les relations avec les grands-parents peuvent être considérées comme contraires à l’intérêt de l’enfant. Seul un motif grave peut empêcher la fixation de tels droits de visite et d’hébergement. Si le père et la mère s’opposent à la fixation de droits de visite et d’hébergement sur leur enfant, il leur appartiendra alors d’apporter la preuve qu’il existe un ou des motifs graves justifiant qu’il n’y ait pas de droit de visite et d’hébergement fixé au profit des grands-parents. Ainsi, un conflit particulièrement aigu, opposant les grands-parents à leur propre enfant, peut fonder le refus du droit de visite des grands-parents, dès lors que cette mésentente aiguë place l’enfant au cœur d’un conflit de loyauté manifestement contraire à son intérêt.

La Cour de Cassation a déjà jugé que le droit de visite des grands-parents devrait être écarté parce que cela serait nuisible à l’équilibre de l’enfant et contraire à son intérêt eu égard au conflit irréductible entre les grands-parents et les parents depuis plus de dix ans. De même, un droit de visite avait été refusé à une grand-mère dans la mesure où le Juge avait estimé que l’attitude de celle-ci avait entraîné une perturbation majeure pour les enfants en les plongeant dans une crise qui ne pouvait les concerner. Cependant, dans d’autres décisions, la Cour de Cassation a estimé que, malgré un conflit familial aigu et ancien, la démarche des grandsparents souhaitant l’octroi de relations personnelles avec leurs petits-enfants, ne constituait pas un acte de malveillance et qu’il était de l’intérêt des petits-enfants de voir nouer progressivement des liens avec leurs grands-parents.

La situation devra être envisagée au cas par cas par le Juge aux Affaires Familiales. La seule existence d’un conflit entre les grands-parents et les parents ne peut justifier le refus d’un droit de visite et d’hébergement. Il faut démontrer qu’il s’agit d’un motif grave contraire à l’intérêt de l’enfant.

Les grands-parents ont donc la possibilité d’engager une procédure judiciaire afin de voir renouer des contacts avec leurs petits-enfants. Cette procédure peut cependant apparaître comme contraignante et relativement longue. La représentation par avocat est obligatoire et le Juge doit être saisi par une assignation délivrée par Huissier de Justice. En outre, le Procureur de la république doit se faire communiquer le dossier pour exprimer son avis. Enfin, l’enfant, capable de discernement, doit être en mesure d’être entendu par le Juge s’il le souhaite. En effet l’enfant peut demander à être entendu par le Juge aux Affaires Familiales afin de faire connaître son sentiment sur la demande des grands-parents.

Parfois, le Juge aux Affaires Familiales peut proposer une mesure de médiation familiale aux parents et aux grands-parents avant de statuer sur la demande de droit de visite et d’hébergement. Cette mesure de médiation familiale peut favoriser une pacification des relations et peut ainsi permettre une reprise des relations entre l’enfant et ses ascendants d’une façon plus sereine.

Il faut donc retenir que les relations entre les ascendants et leurs petits-enfants sont considérées comme un droit de l’enfant. Seul l’intérêt de l’enfant peut faire obstacle à la fixation d’un droit de visite et d’hébergement au profit de ses grands-parents.

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Article publié le 29 OCT 2021 à 09h26 dans la catégorie « Presse ».