La résidence alternée comme mode d’hébergement a-t-elle évolué
- Avocat NJP
- 29 OCT 2021
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La résidence alternée comme mode d’hébergement a-t-elle évolué
Une loi du 4 mars 2002 a introduit le mode de résidence alternée comme étant le premier mode de garde de l’enfant.
Cette proposition visait à poser comme principe le mode d’hébergement alterné.
La polémique autour de cette idée a tellement été importante que cette loi n’a jamais été votée.
Par Maître Natacha JULLIEN-PALLETIER, Avocat, spécialisé en Droit de la Famille
Le souhait de vouloir généraliser la résidence alternée est fondé sur le désir de chacun des parents, lorsqu’ils se séparent, de ne pas être exclu de la vie de leur enfant.
Ce mode de garde permet à chacun des parents de participer activement à l’éducation et à l’évolution de leur enfant sur un mode équilibré.
Bien sûr, être coupé de l’un de ses parents est toujours destructeur pour un enfant.
Cependant, chaque enfant est différent ; il est une personne à part entière avec des besoins bien particuliers dont il faut évidemment tenir compte.
L’article 373-2-9 alinéa 2 du Code Civil permet au Juge d’ordonner l’hébergement alterné de l’enfant « à l’essai » pour une durée déterminée au terme de laquelle il est alors tranché définitivement sur le mode de garde.
Il ne faut pas oublier que le mode d’hébergement alterné ne constitue pas un droit pour les parents mais doit être examiné par le magistrat en tenant compte exclusivement de l’intérêt supérieur de l’enfant.
D’ailleurs la convention internationale des droits de l’enfant prévoit et impose de faire respecter le droit de l’enfant dont les parents sont séparés, d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts direct avec eux, sauf si cela est contraire à son intérêt supérieur.
Cet intérêt primordial de l’enfant doit être au centre de toute fixation du mode d’hébergement.
L’article 373-2-6 du Code Civil impose au juge aux affaires familiales de veiller spécialement à la sauvegarde des intérêts des enfants mineurs.
1 - LES CRITERES RETENUS POUR LA MISE EN PLACE D’UNE RESIDENCE ALTERNEE
Un certain nombre de critères permet la fixation du mode d’hébergement alterné.
1°/ Il est important que le domicile des deux parents soit à proximité du lieu de scolarisation de l’enfant.
L’enfant qui va disposer de deux lieux d’habitation doit pouvoir conserver des repères et poursuivre normalement sa scolarité.
Il est important que chaque parent justifie, par la production de pièces (temps de trajets, itinéraires, etc.) de la proximité du lieu de scolarité de l’enfant.
Le quotidien de cet enfant doit être facilité par de courts déplacements d’un domicile parental à l’autre et également vers son école.
Lorsque les trajets sont trop longs, la résidence alternée peut être refusée.
2°/ Chacun des parents doit démontrer que les conditions matérielles d’accueil de l’enfant sont réunies.
Notamment le parent doit posséder un domicile suffisamment grand pour que l’enfant ait un espace réservé.
3°/ Chaque parent doit également démontrer qu’il est disponible et qu’il est impliqué dans la vie de l’enfant, notamment du point de vue de sa scolarité, de son éducation, de sa santé, etc.
Il est important de justifier qu’au niveau professionnel le parent est disponible pour l’enfant et qu’il est impliqué dans son éducation.
4°/ Lorsqu’un grave conflit parental existe, celui-ci a longtemps été considéré comme un obstacle à la fixation d’une résidence en alternance.
Or, aujourd’hui cela n’est plus systématique.
De plus en plus souvent les magistrats considèrent que le conflit qui oppose les parents ne peut servir à faire échec à la demande de résidence alternée.
Sauf si bien sûr ce conflit parental est empreint de violences.
5°/ L’âge de l’enfant peut également être un critère pour la fixation ou non de l’hébergement alterné.
De nombreuses décisions de justice refusent la résidence en alternance en raison du trop jeune âge de l’enfant.
Il est important d’évaluer au cas par cas la recherche de l’intérêt de l’enfant lorsqu’il est très jeune.
6°/ La stabilité de vie de chaque parent est aussi un critère fréquemment retenue.
La pratique que les parents avaient précédemment adoptée pour le mode de garde de leurs enfants ainsi que les accords qu’ils avaient pu antérieurement conclure sont également des éléments à prendre en considération.
7°/ Le sentiment exprimé par l’enfant peut être retenu.
Le juge tient de plus en plus compte de la volonté de l’enfant lorsque ce dernier est capable de discernement.
En effet, l’enfant peut demander à être entendu par le magistrat.
Cette audition de l’enfant est un précieux indice pour le juge, même s’il est rappelé à l’enfant que ce n’est pas lui qui décide.
Le souhait exprimé par l’enfant, lors de son audition, est un outil qui peut permettre au magistrat de prendre position.
L’adhésion de l’enfant à l’hébergement alterné est un facteur favorable à la mise en place de celui-ci.
Cependant, le souhait exprimé par l’enfant, doit parfois être pris avec prudence ; ce souhait peut être la résultante d’un conflit de loyauté ou d’une emprise de l’un des parents.
Le juge n’est jamais tenu de se conformer au sentiment exprimé par l’enfant.
2 – L’ORGANISATION CONCRETE DE LA RESIDENCE ALTERNEE
La résidence alternée n’implique pas nécessaire un partage purement égalitaire du temps de garde de l’enfant chez chacun des parents.
Lorsque le mode d’hébergement alterné est fixé, le juge veille le plus souvent à ce que celui-ci soit organisé de manière précise et il est souvent prévu le partage des charges matérielles qui en découlent.
La décision judiciaire ou l’accord des parents détermine les modalités financières en ce qui concerne l’entretien de l’enfant.
Le juge peut décider de fixer une part contributive à la charge de l’un ou l’autre des parents lorsque les différences de revenus sont importantes.
Il peut également être prévu un partage par moitié de l’ensemble des frais de l’enfant ou un partage proportionnel aux revenus de chacun des parents.
Chaque parent supporte la charge matérielle et financière de l’enfant pendant son temps de résidence ; mais les autres frais, tels que les frais de scolarité, les frais d’activités extrascolaires, les frais de santé non remboursés, etc. sont alors partagés par moitié entre les parents ou à proportion de leurs revenus.
Il peut aussi être décidé qu’un des parents prendra seul en charge tel ou tel frais concernant l’enfant, comme par exemple les frais de mutuelle, les frais de cantine ou les frais d’activités extrascolaires, etc.
En cas de résidence alternée, le rattachement fiscal et social de l’enfant se partage par moitié entre les deux parents, sauf accord contraire.
3 – FIN DE LA RESIDENCE ALTERNEE
Lorsque des signes de dysfonctionnement apparaissent, le juge n’hésite pas à mettre fin à la résidence alternée.
Le mode de résidence de l’enfant est toujours évolutif.
Il est donc important de veiller à ce que ce mode d’hébergement corresponde toujours, dans le temps, à l’intérêt primordial de l’enfant.
Les statistiques montrent qu’environ 20 % des décisions judiciaires rendues fixent la résidence des enfants en alternance égalitaire au domicile de leurs parents.
Lorsque la séparation des parents est à l’amiable, ce pourcentage passe alors à 30 %.
Cependant, la proportion des enfants vivant effectivement en résidence alternée, est sans doute beaucoup plus importante puisque ces pourcentages ne mesurent pas tous les cas où les parents fixent le mode de résidence de leur enfant sans passer par la justice.
En tout état de cause l’évaluation des besoins de l’enfant reste au cœur des préoccupations du fonctionnement judiciaire.
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Article publié le 29 OCT 2021 à 08h46 dans la catégorie « Presse ».